Yuki

La neige tombait et fondait sur les ailes de feu du phoénix ardent, volant au gré des vents, là où ils accepteraient de la porter. Ihai, la déesse du feu, bravant les cieux sous la neige abondante, à la merci des éléments. Le décor était idyllique, perdue au-dessus des océans, quelques fleurs de cerisier se mêlant aux flocons blancs. Au beau milieu des mers, tout était permis, bravant les lois mêmes de la logique. Ihai, elle, ne pouvait que regarder le spectacle tout autour d'elle d'un air désabusé. Pour elle, ce jour n'était pas à la rigolade, ou à l'émerveillement, contrairement aux autres êtres.

Malgré tous leurs pouvoirs, même les dieux fêtaient Noël, et ce jour était bien celui qu'Ihai attendait et redoutait le plus depuis bien longtemps. Ce n'était plus l'Espoir qui la conduisait ici, mais bien le désespoir. Elle ne se leurrait point, elle n'aurait plus aucune occasion de voir Yuki.

Hinotsubasa, son phoénix, semblait lui aussi ressentir la tristesse de sa maîtresse, et devait sûrement s'inquiéter. Les déesses primaires, comme Ihai, ne sont pas censées voir leur devoir perturbé par de quelconques sensations, ou des choses aussi futiles que des sentiments. Ces petites choses essentielles pour les humains, mais tellement handicapant pour les Dieux, à tel point que toute trace de ressenti se devait être sévèrement punie par Shikō-shin, leur maître à tous. Rien ne pouvait autoriser Ihai à se rendre ici, en ces mers sacrées, pour revoir sa bien-aimée.

La neige commençait déjà à faiblir. Ihai ne savait plus quoi faire, ni où se rendre. Où retrouver Yuki, où elle pourrait enfin la revoir, sûrement pour la dernière fois. Et sûrement à cause d'elle.

Ihai, déesse de petite envergure au commencement, avait grandi, peu à peu, pour finalement atteindre le sommet. Ihai, déesse du feu, était devenue une déesse primaire, et son pouvoir ne cessait d'augmenter. Si bien que la terre en ressentit ses effets, et commença à se réchauffer. À l'heure actuelle, il n'y avait guère que dans le cercle polaire qu'on pouvait trouver de la neige, le soir de Noël, mais qui sait si elle sera là l'année suivante...

Soudain, une lumière apparut face à Ihai, stoppant net Hinotsubasa qui poussa un petit cri de stupeur. Une lumière blanche et pâle, à peine grande de quelques mètres, se distinguait dans le ciel étoilé. La chute des flocons avait gagné en intensité, mais fondait immédiatement à l'approche de la sulfureuse déesse, laissant son kimono rouge à motifs fleuris totalement sec.

Le silence régnait en maître autour de la déesse quand Yuki apparut enfin. Yuki et sa peau si pâle, Yuki et ses yeux si bleus, tout autant que ses cheveux. Yuki et son dragon blanc, arborant fièrement sa crinière bleue. Yuki et ses flocons d'argent.

Les deux femmes restèrent à se contempler un long moment, tentant de faire durer l'instant. Voilà bien des siècles qu'elles se connaissaient, aucune n'auraient pensé que leur histoire se finirait de cette manière. La neige tourbillonnait autour de Yuki, pour se dissoudre en approchant d'Ihai. Aucune émotion ne transparaissait dans leurs visages. De loin, quelques oiseaux auraient pu voir une tache rouge, et une tache d'un blanc pur se faire face à face dans le ciel étoilé, entourés par les flocons de neige, et des bourrasques de fleurs de cerisier. Un dieu farceur, Sakura, qui devait observer la scène de loin.

Puis, peu à peu, comme conscientes du temps qu'il leur restait à toutes les deux, Yuki s'approcha lentement de la déesse du feu, laissant les flocons disparaître à son approche. La femme pâlissait au fur et à mesure qu'elle s'approchait de la déesse ardente, pour ne bientôt devenir qu'une ombre blanchâtre. Ihai, laissa transparaître un rictus effrayé sur son visage pour l'effacer aussitôt. Elle était bien consciente de la situation, et savait que Yuki ne tarderait pas à disparaître pour toujours.

D'un geste, elle ordonna à Hinotsubasa de s'élever dans les cieux, ce qu'il fit immédiatement, emportant la déesse des flammes avec lui. La suivant un instant du regard, Yuki ne tarda pas de faire de même avec son dragon. Ihai s'élevait de plus en plus haut dans le ciel, tandis que la déesse de la neige la suivait, tourbillonnant telle les petits flocons d'argent tout autour d'elle, sans s'en approcher. Tout en faisant attention à se tenir éloigné, la déesse du feu s'amusa également à tourbillonner tout autour de Yuki, s'engageant dans cette drôle de danse mortelle. Quelques centimètres trop près, et la déesse des neiges éphémères disparaîtrait pour toujours.

Puis, à quelques dizaines de mètres de l'océan, Hinotsubasa se stoppa avec sa maîtresse, juste sous les cieux étoilés, parsemés de nuages chargés de flocons. Yuki se posta sans un mot face à Ihai, et se leva sur le dos de son dragon bleu. La déesse flamboyante fit de même sur les ailes de son phoénix. Lentement, Yuki leva son bras pour le tendre vers la Ihai. Sa main blanche s'ouvra, comme pour inciter la déesse à mettre fin à cette danse macabre. Le temps des réjouissances et des amours étaient bien révolus.

Ihai tendit sa main, et se risqua à toucher celle de sa bien-aimée. À peine l'avait-elle frôlée que la déesse éphémère disparut avec les flocons.
Une larme coula doucement sur la joue de la déesse du feu. Toujours, il continuerait de neiger dans son cœur, même sans la déesse des flocons à ses côtés.

Il était dit dans une ancienne légende que les dieux aux pouvoirs révolus partaient vers un lieu sacré après avoir sombré dans l'oubli. En ce lieu, semblable au paradis, une maison douillette aurait été construite pour chaque Dieu, et accueillerait ces Dieux une fois leur temps révolu. Puis ce Dieu nouvellement arrivé construirait une autre maison, pour accueillir le dieu qui aurait volé son cœur.

Une maison douillette ensevelie sous la neige attendra toujours qu'Ihai vienne la découvrir de son manteau neigeux.

[Texte réalisée à partir des mots "Yuki", cette image et cette chanson. Merci à @FaizeRPG, @HinokeChan et @Yliam42! N'hésitez pas à commenter, à partager, à voter ce texte. Et n'oubliez pas de me suivre sur twitter pour me proposer des mots, des images ou des musiques pour le prochain texte! (@JudyKagamine) Sur ce, bonne lecture!]

Comments

[La méduse]

c'est comme un conte, un conte venant d'ailleurs.

Tu sais, je n'arrive pas à comprendre pourquoi, mais quand je lis tes textes, je visualise toutes les images, je m'imagine tout, à ma manière. Un prof d'art appliqué avait dit qu'une production plastique était réussie quand on ne savait pas comment elle avait été faite. Ici, je ne comprends pas par quelle magie, mais ça m'emporte.



je me souviens, tu m'avais dis, que l'amour te fascinait...

[Sprites]

kukuku ainsi finit un dieu mineur ...

[Nixop]

Applaudissement, s'too quoi : http://vocaroo.com/i/s1jWGG5OoLPp