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Rêve de May
20 juillet 2013

Enjoy: Chapitre 1

Shiuka

 

Les lumières, le son, et bientôt les odeurs s’enchevêtraient sans fin. La salle plongée dans le noir ne laissait paraître que deux rayons de lumière, éclairant la grande scène. On écoutait presque plus l'assourdissante mélodie émanant du groupe, de vaines paroles mille fois entendus, sans impact. La raison se dissipait dans ces cris dits mélodieux, dans la sueur et l'alcool. Le public n'était plus réceptif à la mélodie, bavassant, hurlant autour du Bar, dans la pénombre, au fond de la salle. Le concert avait une bonne promotion, en un entrepôt désaffecté, la première prestation d'un groupe prometteur. La vérité était qu'il avait été organisé uniquement par le groupe, ils n'avaient de prometteur que l’appellation.

Sur scène, un batteur, un guitariste, un bassiste et une étrange chanteuse, du haut de ses quinze ans. Le reste du groupe ressemblait à n'importe quel groupe de rock un peu métalleux, affichant nombre de piercings en tous genres. Autant cette fille dégageait quelque chose de mystique, une aura étonnante. Elle chantait avec conviction, des airs qui ne lui appartenait pas. Comme si elle en pensait d'autres. Elle hurlait avec ses poumons, ces cris venaient du fond de son cœur, plus encore pour ceux qui suivirent. Elle était bien petite, mais ne manquait pas de prestance, dans son costume de scène pourpre, composé simplement d'un haut de tailleur et d'un short, laissant voir son nombril et sa silhouette parfaite. Une cravate violette ponctuait tout ça d'une touche de couleur, et un bracelet à clochettes de la même couleur tintait de temps à autre.



Le groupe cessa de jouer, la soirée avait bien avancé, le concert s'achevait. Déjà, nombre d'hommes ivres sortaient en ligne de l’entrepôt qui commençait à sentir le renfermé. Le guitariste lâcha son instrument, le déposa derrière la scène, derrière un rideau servant de coulisse de fortune. Les autres membres du groupe firent de même, le batteur commençait à remballer ses percussions dans un fracas sonore. Mais la jeune chanteuse restait debout, les yeux dans le vide, vers l'horizon. Elle tenait son micro à la main, ses cheveux noirs faisaient des reflets bleus dans la lumière. Le guitariste aux cheveux aussi noirs qu'elle, vint poser une main sur son épaule, qu'elle repoussa d'un geste : « Le concert n'est pas terminé

-Qu'est-ce que tu racontes, Elodie ? C'est fini, on n'a plus de chanson, tout le monde est parti.

-Non, il reste des gens

-Oui, et ils attendent que tu descendes de la scène.

-Non.


Elodie saisit son micro, et ordonna à la salle :

-Le concert n'est pas terminé !

-Elodie arrête... »

Elle était sourde à ses recommandations. Son esprits était ailleurs. Le public, en face, la regardait, silencieux. Tous sentaient qu'il se passait bien quelque chose d'étrange. La jeune fille saisit son micro, et commença à entonner un air. La musique avait cessé, mais pas en son esprit, et une larme perlait au coin de ses yeux :

Je me suis battu,

Longtemps, bien trop longtemps, j'ai été vaincu.

Ton sourire, jamais je ne reverrais

Mais à jamais,

je t'aimerai

Mon amour pour toi

en moi sera toujours.

Joy, Enjoy, Joy, Enjoy

Pour un nom comme le tien

Je ne peux que chanter le malheur.

Merci quand même,

Je ne suis plus que l'ombre de moi-même,

Joy, Enjoy, Joy, Enjoy.

Le rideau se referma brutalement devant Elodie. Prise par la musique, les yeux vides, elle continuait à chanter. Le guitariste la secoua par les épaules, la suppliant d'arrêter. Le public était resté subjugué, sans savoir ce qui se passait.

« Putain, Elodie ! Je croyais que c'était fini cette histoire ! T'avais dit que tu ferais plus ça ! Frangine, tu me fais flipper là ! »

La jeune fille avait retrouvé ses esprits. Sans prêter attention à son frère, elle s'installa sur une chaise aux alentours. Leurs camarades de groupes étaient déjà partis, emportant leurs instruments, et se donnant rendez-vous au week-end prochain, pour les répétitions. Elodie sécha ses larmes, une boule dans la gorge, et mit des écouteurs à ses oreilles, que son frère s'empressa d'arracher :

-Regarde-moi ! Tu nous à ridiculiser devant notre premier public ! Qu'est-ce qui t'a pris ! Ça va nous retomber dessus cette histoire !

La jeune fille obéit, et regarda son frère dans ses yeux bleus marine, semblables aux siens, et répondit :

-Tu ne parles que de toi, et de notre groupe. Tu ne sais pas ce que c'est la souffrance, Alexandre.»

Elodie saisit ses écouteurs, les mis à ses oreilles, et se dirigea vers la sortie, allumant son baladeur. Alexandre la saisit par l'épaule, et lui hurla qu'ils n'avaient pas fini de discuter. La jeune fille l’ignorât avant de s'esquiver.

L’entrepôt du concert se trouvait légèrement en dehors de la ville. Elodie n'avait qu'une idée en tête, courir loin, le plus loin possible. Joy, Joy, Joy, Joy... Bien sur qu'elle l'aimait encore. Son souvenir restait toujours en sa mémoire, lancinante. Elle sentit les larmes couler sur ses joues, avant de se mettre à courir, de plus en plus vite. Filant sur les chemins gris, elle se fichait un peu de sa destination... Prise dans l'ivresse de la musique à ses oreilles, elle irait au bout du monde, pour voir Joy.

Dieu, pourquoi l'amour est si cruel ?

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